Le tapotement obsédant venait enfin de s'éteindre. Depuis plus de deux heures, Kevin avait martelé sa feuille de papier de la pointe de ses crayons gras, deux heures dans un état second, sans presque cligner des yeux, les doigts crispés sur les bâtonnets de cire colorée. Si au début, le changement dans le son l'avait un peu dérangé, l'impression avait finalement fini par être noyée par la transe.
Relevant la tête, au bout de son cou aux muscles noués par la concentration, il examina son "travail". La feuille était la plus grande sur laquelle il ait jamais dessiné. Ce n'était pas une des feuilles de papier à dessin standard, à fort grammage, qu'il utilisait habituellement, non, ce papier venait de la photocopieuse de la bibliothèque. Kevin aurait pu sourire au souvenir de l'étonnement de la bibliothécaire, quand il la lui avait demandée, de sa surprise mais aussi de son amusement quand elle l'avait tirée de la machine. Le même genre de surprise quand il lui avait demandé si elle pouvait lui prêter une loupe, une semaine plus tôt. Une semaine qu'il avait passé à examiner minutieusement les trois reproductions d'un artefact dont il disposait : une photo dans un livre, une image sur internet et la capture d'une pause-écran dans une vidéo documentaire.

Kevin eût un frisson qui le ramena au présent. Il palpa un coin de la feuille de ses doigts douloureux ...

Fine. Frazile ... Bien fait de pas utiliser le lièze, ze serais surement passé à travers. Combien de temps elle va tenir ?

Il remarqua alors ses doigts, maculés de cire et de pigments, et ne sentit qu'à cet instant que sa peau lui tirait, sur les joues et le front. Il vit aussi le champs de bataille qu'était devenu son bureau, les craies éparpillées, certaines cassées, les rognures de cire et de papier, l'état dégoutant de son petit couteau de poche.

Hoo nooooon ! Ze dois en avoir partout ! Et va falloir que ze nettoie ce gâssis le plus vite possible.

L'enfant soupira, autant de soulagement d'avoir fini, que d'abattement au vu de ce qu'il restait à faire.

Mais d'abord, me laver et soigner mes yeux, heureusement qu'on est Dimansse !

Il se leva avec un petit grognement et une grimace, pour se diriger vers son armoire, mais se figea : assis en tailleur sur son lit, Gregory le fixait, les yeux ronds, avec la posture de quelqu'un qui a BEAUCOUP  de questions à poser.
Kevin finit par baisser la tête, essayant d'utiliser sa frange pour cacher ses yeux rougis et gonflés.

- Ho ! Salut ! Y'a longtemps que t'es là ? Ze t'avais pas entendu rentrer ...

Gregory pénétra le bâtiment junior. Il était encore une fois plein de boue à cause de la pluie. Il enleva ses baskets, les secoua à l’extérieur du bâtiment quelques instants avant de foncer en courant vers les escaliers. Il faillit chuter sur le palier de son étage. Il se rattrapa parfaitement, comme s’il ne s’était rien passé. Il ouvrit en grand la porte de sa chambre où devait déjà se trouver Kevin. Ea ayant finalement refusé catégoriquement de vivre dans une pièce où se trouve un ordinateur en état de marche. Gregory récupéra un uniforme propre préparé le matin, de même que ses affaires de toilettes, et ressortit aussi vite qu’il était rentré. Il descendit les escaliers rapidement pour rejoindre les douches communes des garçons. Il posa ses affaires, se déshabilla. Il détacha la ceinture qui lui servait à porter sa dague et la posa avec le reste. Il la plaça avec soin en dessous de tous ses vêtements. Même si tout le monde savait qu’il se trimballait toujours avec, il n’aimait pas trop la montrer, ça en effrayait autant que ça en fascinait. Et dans les deux cas, le brun avait compris que ce n’était pas bon. Mais ça ne changeait en rien sa volonté de collectionner les armes et de connaître le maximum de maniements de celles-ci.

La douche fut agréable après cet entrainement intensif avec les bleu-ciel. Gregory aimait participer à ces sessions, surtout que cette année, ça allait être son tour. Plus qu’à attendre son anniversaire début avril et il pourrait partir avec la première session du PEI qui vient. Le rouge se sécha et se vêtit de nouveau avant de remonter dans sa chambre, beaucoup plus calmement et la ceinture à la main ou plutôt enfouie sur sa main en dessous des affaires de toilettes et le linge sale. Ce dernier ne restant pas longtemps dans les mains du gamin qui le plaça dans un bac pour la laverie.

Gregory entra dans sa chambre et un tapotement vint lui agresser les oreilles. Il se tourna vers son camarde de chambre qui martelait Dieu sait quoi sur ce qui semble être une feuille. Gregory haussa les épaules et alla ranger ses affaires de toilette avec soin. Puis il se posa sur son lit les jambes en tailleurs, sa dague posée à ses côtés, prête à rejoindre son oreiller pour la nuit. Le regard du brun se posa sur le dos de Kevin. La première question qu’il se posa était « Depuis combien de temps il est ainsi ? ». Cela faisait près d’une heure que le rouge était entré à renfort de grands bruits. Gregory observa un air interrogatif apparaissant et se marquant de plus en plus sur son visage. Kevin se leva et se tourna enfin. Assis sur son lit le brun esquissa un sourire mais conservant son air interrogatif.

Et bien ça doit faire dix minutes que je t’observe. Il me semblait que tu avais un don pour l’observation, trop concentré ? Sinon, pour ne pas m’entendre, je sais pas comment tu as fait. Il y a une heure j’ai presque littéralement fracassé cette porte.

Gregory désigna la porte de leur chambre avant de se lever pour s’approcher de Kevin. Ce dernier était maculé de couleurs en tout genre. Mais ce qui intéressait le brun était la feuille. Il se pencha pour observer ce dessin d’un objet qui ne disait strictement rien au gamin.

C’est quoi comme objet ? En tout cas il est très réaliste. Tu dessines bien.

- ho ? Et bien ... oui ... désolé ... ze ...

Kevin ne savait pas trop par quoi commencer, la fatigue s'abattait sur lui comme jamais. Ou plutôt, comme à chaque fois, comme à chaque transe. Il se traina vers son armoire, ses affaires de toilette. Un coup d'oeil lui suffit par voir qu'il n'avait pas besoin de se changer, juste enlever la cire qui lui marquait les mains et le visage. Il ajouta dans sa trousse la boite de compresses et le flacon de sérum physiologique avec lequel il allait devoir laver ses yeux, pour les ré-hydrater.

- Ze vois que tu as pris une dousse, ze vais devoir y aller moi aussi ... Quand à ce qui vient de se passer, ze dirais pas que c'était de la concentration, plutôt une transe ... mémorielle. Ça me sert à visualiser une imaze que z'ai enrezistrée, même si là, ça a été plus dur que zamais, ze devais faire une seule imaze à partir de trois ...

Une légère faiblesse força Kevin à se rasseoir, et son agacement risquait de se voir. Il n'aimait pas se sentir faible, même si le paraitre ne le gênait pas, tant que c'était stratégique. Il sortit un paquet de gâteaux secs de son tiroir, en prit un du bout des doigts, et tendit le paquet vers son camarade de chambre. Voyant l'intérêt de l'autre, il fit pivoter la feuille d'un quart de tour, afin que l'objet devienne reconnaissable : Une sorte de dessin d'un écorché humain, avec des lignes, des nœuds et des idéogrammes tout autour, le tout sur un support irrégulier, dont certains bouts semblaient manquer.

- Ceci était le plus ancien document médical Ssinois qui soit parvenu zusqu'à nous. Ze dis Ssinois, mais c'était peut-être le plus vieux du monde, si on compte pas les hiéroglyphes.
Était, parce que ce rouleau de lattes de bambous a été détruit dans l'incendie du musée de Nankin, l'année dernière. Il m'intéresse, parce que là dessus se trouvent à la fois des indications d'acupuncture, de circulation du ki et des représentations des nœuds nerveux. Mon problème, c'est que ze sais pas lire le Ssinois, et que ze sais même pas de quel Ssinois il s'azit, ce truc était vieux de seize siècles.

Kevin s'adossa sur son siège, et ferma brièvement les yeux.

Ne pas s'endormir ! Pas tout de suite ! La dousse pour se réveiller, ensuite on pourra discuter.

- Ze vais me laver, si tu veux, ze te laisse regarder, fais zuste attention à pas te salir ... et regardes où tu mets les pieds, pourrait y avoir des bouts de craie par terre, promis, ze nettoie en revenant !

D'un effort, considérable pour lui, certainement perceptible pour l'autre, Kevin se leva et se mit en route pour le rez-de-chaussée.

Pourvu que ze m'endorme pas en ssemin

Gregory écouta Kevin parler de sa transe mémorielle drôle de nom, mais très adéquat. Le gamin ayant été incapable d’entendre le brun alors qu’il a fait un raffut du diable. Enfin, ça faisait sortir le cadet de son image de victime pas à sa place. Même si de base, il ne pouvait pas être une simple victime pour être ici. Mais s’il reste ad vida aeternam dans son espèce de rôle, il ne pourra pas forcément faire des missions où s’illustrer. Enfin cela n’est que l’avis de Gregory.

Gregory observa le document. Il avait compris que c’était du chinois avant que son camarade en parle. Les yeux parcourant le document composé de caractères chinois archaïques datant d’avant le sixième siècle de notre ère. Le gamin ne pouvait pas le traduire. Il n’était même pas capable de traduire en chinois médiéval. Pour traduire ce document il faudrait traduire l’archaïque en médiéval puis celui-ci en chinois simplifiés pour finir par traduire en anglais. Un vrai casse-tête, casse-tête que le gamin voulait tenter de réussir.

Gregory fit signe à Kevin de partir sans le regarder. Lui, prit le document et alla vers son bureau où il alluma son ordinateur. Première chose, essayé de voir si c’était possible de le traduire. Internet lui donna des clés mais étaient-elles bonnes ? Il soupira et s’engagea dans une traduction. Quand il entendit la porte s’ouvrir, sans lever le nez du document, le gamin prit la parole.

J’ai pris le document. Je te l’emprunte pour quelques jours.

Et Gregory continua son travail. Il allait vraiment y passer un bout de temps. Il pensait même demander au professeur de chinois de l’aider, s’il pouvait. Parce qu’il avait tout juste traduit même pas deux caractères du document. Il soupira et se leva pour regarder Kevin.

Parles moi de cet incendie et de ce que tu sais du contenu du document. Cela pourra peut-être éviter de me tromper complètement, enfin si j’arrive à le traduire. Et sache que c’est pas facile. Les langues changent beaucoup en seize siècles. Enfin, l’incendie c’est juste ma propre curiosité.

Gregory fit un sourire montrant un calme. Même s’il savait que l’autre allait comprendre que ce n’était pas le calme qui régnait dans l’esprit du brun, mais plutôt l’excitation. Il s’approcha de Kevin les yeux brillants de curiosité. Même si ces sourires ne correspondaient pas forcément à ses sentiments, ses yeux sont de vrais miroirs de son âme.

La douche lui avait fait le plus grand bien. Il avait tant bien que mal réussi à masser son cou douloureux, mais n'avait pu atteindre le nœud de douleur dans son dos, entre ses omoplates. Il avait regardé, surpris, les ruisselets de couleur serpenter autour de ses pieds, pendant que l'eau tiède lui coulait à grand flot sur la tête. Il n'aurait jamais pensé s'en mettre jusque dans les cheveux, mais cette transe avait été la plus longue qu'il n'ait jamais subi.
Le fait de penser à la transe le ramena au dessin, et du dessin à l'attention de son camarade de chambre.

Etranze ! Certes il a eu l'air surpris, et pas que par le dessin. Il a eu l'air satisfait, aussi, comme de découvrir quelque ssose ... mais sur moi ! D'accord, ça peut vouloir dire qu'il a découvert le rôle, mais que ça lui suffisait pas, il avait l'air heureux qu'il y ait plus ... Marrant, ça prouve que c'est pas zuste une brute.

Après s'être séché consciencieusement -avec ce temps, pas la peine de risquer d’attraper un refroidissement - avec la gène due à son dos récalcitrant, il passa par le local à balais avant de regagner sa chambre.

Il vit tout de suite Gregory à son bureau, son ordinateur allumé, penché sur son dessin, une feuille de notes à côté, en train d'essayer de résoudre cette énigme, l'air super concentré. Il secoua la tête, à la fois surpris et amusé de cet engouement, et se dirigea vers son bureau, en faisant très attention où il posait les pieds, et se mit à nettoyer le foutoir. Il dut se retenir de grogner quand Gregory lui annonça vouloir étudier le dessin, pendant au moins quelques jours.
Il avait fini de nettoyer, et considérait avec désolation ce qu'il restait de sa boite de crayons gras, assis sur sa chaise pivotante, quand l'autre rouge émergea de son étude, avec un soupir. La première partie de la question le surprit, bien plus que la suite.

L'incendie ? Quoi l'incendie ? quel rapport, quelle importance ? ... ou alors ... un complot ?

- Ze ne sais pas grand ssose de cet incendie, juste qu'il était cité dans le documentaire "Trésors et Secrets de la Ssine Ancienne" où z'ai vu cet obzet pour la seconde fois. Ze crois qu'ils parlaient d'un feu accidentel, mais ze suis pas sur ... Sinon, ce rouleau et plusieurs autres qui parlaient de médecine par les plantes ont été découverts dans les ruines d'un vieux monastère abandonné pendant plusieurs siècles dans la rézion des mont Wu Dang. Ils auraient été préservés parce que la bibliothèque avait été ensevelie par un glissement de terrain, ce qui explique qu'ils aient pas pourri.

Kevin avait vu Gregory se lever, puis s'approcher de lui. Il avait tourné son siège vers lui et avait remarqué le regard brillant, puis le sourire, que le plus vieux avait voulu détendu, mais qui ne l'était pas, mais alors pas du tout. Un sourire gourmand, un regard avide, Kevin se faisait l'effet d'être une pâtisserie abandonnée à portée d'un gamin affamé, impression des plus désagréables. Il ne put retenir un petit frisson et fixa Gregory dans les yeux, alors que celui avait approché jusqu'à poser les mains sur les accoudoirs de son siège de bureau, comme pour lui interdire toute fuite, tandis que sa tête se baissait lentement, à tel point que leurs nez soient presque en contact.
C'est presque dans un murmure, que Kevin finit par répondre.

- Ça ne me zêne pas que tu gardes le dessin pour l'étudier, ça serait trop zénial que tu réussisses à le traduire. Mais stoplé, évite de le montrer à trop de zens, ou alors, essayes au moins de rester très évasif si on te pose des questions. Z'ai pas du tout envie de devenir un monstre de foire ... enfin, pas plus que ze le suis déza, disons.
Quand au rouleau, ze pense que ça peut avoir un rapport avec le kung-fu de Wudang, les éternels rivaux du kung-fu de Shaolin, les internes contre les externes ... Tu vois, moi aussi, z'ai fait quelques ressersses ...

La médecine ? Hum intéressant, vraiment intéressant. Gregory ne cessa de s’approcher que lorsque son visage fut extrêmement près de celui de Kevin. Le brun souriait toujours, dévoilant doucement ses dents. De même que leurs souffles se mélangeaient. Ce dernier continua de parler au plus grand plaisir du gamin. Il éclata de rire en s’éloignant un peu.

Toi, un monstre de foire. Ha ha ! C’est à moins que tu dis ça ? Si je n’étais pas aussi amical, je serais un monstre de foire. Mais je suis trop gentil pour être un monstre. Tee hé

Gregory tira la langue à Kevin. C’était rare qu’il soit aussi franc. Lui aussi se cachait derrière les apparences, mais il ne doutait pas que tout le monde se cachait derrière des apparences dans ce campus. De plus, c’est ce qu’on leur apprenait. Pour le bien d’accomplir une mission. Il soupira en allant chercher sa dague pour jouer avec, la lame à nue. Il ne craignait pas de se blesser il la connaissait par cœur, comme si cet objet ne pouvait le trahir de par sa conscience.

Tu vois, je suis digne d’être dans un cirque… Comme lanceur de couteaux. Mais bon, techniquement seul le professeur de chinois pourra m’aider donc ta réputation ne devrait pas en prendre un coup.

Gregory haussa les épaules, les yeux semblant vides, avant de lancer sa dague qui alla se planter dans le bois de son bureau. Un sourire satisfait, les yeux brillants. Il se replaça à proximité de Kevin où il planta son regard émeraude dans les yeux de l’autre rouge. Le gamin sentait que l’autre n’était pas à l’aise et les yeux étant le reflet de l’âme, Gregory sentait que Kevin ne pouvait guère se cacher derrière son rôle.

Dis-moi, est-ce la médecine ou les arts martiaux qui t’intéresse le plus ?

Gregory sourit et se décida à retourner à son bureau. Le gamin avisa l’heure. Son estomac sembla se réveiller d’un coup. Il rangea tranquillement tout ce qu’il avait sorti et éteignit son ordinateur. Il enferma le document ainsi que les notes dans son bureau. Il récupéra sa dague et la rangea dans son fourreau. Il attacha le ceinturon autour de son torse après avoir relevé son t-shirt. Il tendit sa main vers Kevin.

On va manger ?

Gregory sortit son plus beau sourire et d’un pas presque dansant il s’avança vers la sortie pour se diriger doucement vers le réfectoire.

Que Gregory lui tire la langue fut une surprise, pour Kevin, une bonne surprise.

Enfin ! L'enfant sous la cuirasse, cette école ne fabrique pas que des machines !

Le retour au mode pensif de l'autre rouge l'attrista bien un peu, mais il pensa avoir réussi à la cacher.

De nouveau cette lame ... Plus un bouclier qu'une arme on dirait .... destinée à tenir le monde à distance ... Doit se sentir bien seul !

- Un cirque ... C'est une drôle d'idée ... Comment c'est, de vivre dans un cirque, d'après toi, tu crois que tu aimerais ? Et puis d'accord pour ton prof de Ssinois, ze crois que les profs ont un devoir de discrétion envers les élèves. Même si la directrice est déza au courant, pour mes ... "dessins".

Le petit sursauta au bruit sec que fit la lame en se plantant dans le bois du bureau, et la vue de la lame sortant du bois ramena à la conscience le souvenir d'une autre image, qu'il aurait préféré pouvoir oublier. Le malaise ressenti devait être palpable, il savait ne pas pouvoir le cacher à son compagnon. Tout comme il lui devait une certaine part de vérité, pour ne pas que le grand se sente repoussé.

- Ze ... ze n'aime pas trop les couteaux ... C'est comme ça que ma mère est morte ...

La phrase, murmurée avec un soupçon de détresse, tomba en même temps que la question de Gregory. Kevin avala sa salive, ne sachant trop s'il espérait que l'autre l'ait entendu, ou s'il valait mieux que non.

- La médecine ou les Arts Martiaux ... en fait, z'ai lu des textes qui disaient que c'était lié, la pratique des uns demandant un grand savoir de l'autre, entre autre pour connaitre et maitriser la frontière entre blesser et tuer. Z'ai lu aussi des trucs sur une des école du kung-fu Wudang qui s’appellerait "La Voie du Serpent", mais ze sais pas si c'est vrai ou si c'est une lézende, ça parle de frappe portant sur les points vitaux, les centres nerveux, et les points de faiblesse du corps, comme les artère près des articulations, là où elles sont pas protézées par les muscles...

La proposition d'aller manger tomba à pic ! Il était temps de changer d'état d'esprit, et Kevin se leva, rangea son siège de bureau, et sans répondre, parce que ce n'était pas utile, saisit la main que lui tendait Gregory. Il le suivit dehors, avec un sourire qui lui donnait l'impression qu'il faisait trois fois le tour de sa tête.

Etre un enfant ... Encore un peu ...

Gregory n’avait pas particulièrement pensé à toute la vie autour du cirque. Enfin, il aurait le temps d’y penser plus tard. Ce qui interpella un peu plus le brun fut l’accentuation sur les dessins de Kevin. Comme s’ils avaient un autre nom, mais qu’il n’arrivait pas à le trouver. Quel drôle de chose. Ce matin il aurait juré que Kevin était incapable de parler correctement, enfin pas sans le zozotement qui pouvait exaspérer les gens. Et là ils s’étaient trouvé de quoi parler de manière un peu plus amicale.

Au son sec de la lame, Kevin sursauta Il n’aimait pas. Gregory en déduisit que comme pour Ea, c’était des souvenirs du passé qui remontait. Il garda le silence, attendant la réponse à sa question. Et un sourire éclaira son visage. En prenant la main de Kevin, Gregory ne cessa de sourire.

Ma mère m’en a parlé, de tout ce qui lie médecine ancienne et art martial quel qu’il soit.

Même si reparler de sa mère avait légèrement assombrit son regard, Gregory continua d’avancer de son pas dansant vers le réfectoire. Il conserva aussi son sourire. Dans la salle commune, il exhiba sa main liée à celle de Kevin, l’air de dire « lui aussi est un gamin cool avec un passé ». Une fois dehors, Gregory le relâcha.

Désolé, j’ai profité de mon statut. Enfin je considère que tu as besoin de les connaître. Autant pour le PEI que pour les missions.

Gregory soupira. Oui, il avait profité de son statut. Tous les rouges le respectaient et connaissaient sa maîtrise des arts martiaux. Tous autant qu’ils sont. Ou plutôt tous ceux qu’ils pouvaient apprendre. Les personnes qui n’appréciaient pas le rouge se comptaient sur les doigts d’une main. Le garçon continua sa route vers le réfectoire.